Perceptions des producteurs sur les pratiques agroécologiques dans la commune rurale de Lena

Submitted by RedacteurenChef on Fri 02/05/2025 - 10:01
Perceptions des producteurs sur les pratiques agroécologiques dans la commune rurale de Lena

Résumé

L’agroécologie est une pratique bien connue dans la commune rurale de Lena. A la lumière des recherches menées par les structures agricoles, des nouvelles méthodes agroécologiques sont implémentées dans la localité avec la participation des populations. Cette implémentation requière l’assentiment des producteurs de la localité qui envisagent bien booster leurs rendements grâce à ces nouvelles techniques.

Introduction

L’adoption de l’agroécologie se pose comme nécessité de nos jours au regard de la dégradation continue des terres cultivables. Dans le contexte de Lena, les acteurs de vulgarisation accompagnent les producteurs dans l’implémentation de diverses techniques agroécologiques. Dans cette démarche, il convient d’analyser et comprendre les logiques des producteurs locaux dans un contexte où les savoirs et savoir-faire endogènes sont combinés et/ ou substitués a des méthodes innovantes des structures de recherches.

Méthodologie

Située dans la partie Ouest de la province du Houet, la commune rurale de Lèna, se trouve à 55 km de la ville de Bobo-Dioulasso. Parmi les 14 villages qu’elle regroupe, ceux de Yabasso, Bodialedaga et Konzo sont ceux retenus par cette présente étude. L’étude a concerné les producteurs des trois villages (individuelle, faitière, leader coutumiers, président CVD), des responsables des projets /programmes de développement et structures intervenant dans le domaine de l’agroécologie, des agents des services d’encadrements et des personnes ressources (collectivité territoriale).

La technique d’échantillonnage utilisée est non probabiliste. Au niveau des producteurs, un choix non- aléatoire par saturation a été fait. En raison de l’absence d’un répertoire exhaustif des projet, association, ONG, faitière dans la zone de Léna, la technique de boule de neige a été préconisée pour ce groupe d’acteur. Au total, 79 personnes ont été enquêtées. La méthode qualitative fondée sur des entretiens semi-structurées a été adoptée à l’aide d’un guide d’entretien élaboré en fonction du sujet et de la cible de l’étude. Pour le traitement des données, la technique de l’analyse de contenue (Campenhoudt et al., 2017 ; Berelson, 1952) a été choisie. 

  1. Discussion des résultats

Les perceptions des producteurs sur l’agroécologie peuvent être appréhendées sous deux angles. D’une part, l’approche définitionnelle de l’agroécologie et de l’autre, son importance et son apport dans l’amélioration de la productivité. Du point de vue définitionnel, l’agroécologie est assimilée aux techniques de restauration et d’entretien des terres selon les représentations sociales Fayama et Héma (2024). Dans les langues locales, l’agroécologie renvoie au « forolado kanèma segui dougoulokan » ou « kassènè lacroya kayèlèmanido sènè konon mibi se ka sorror bougouya » en dioula et « lagasson téténou bènèbènè » en bwamu Fayama et Héma (2024). Toutes ces deux appellations signifient les pratiques d’entretien pour une meilleure restauration du sol. On comprend aisément lorsque les enquêtés définissent l’agroécologie comme « l’ensemble des pratiques agricoles qui permet d’augmenter la productivité du sol et du même coup augmenter le rendement de nos cultures » M. L.C (H. 21 Konzo, 24 Septembre 2022) ou « l’ensemble des techniques de résolution des problèmes du sol » (M.Y., H. Bodialedaga, 09 Novembre 2022). Quant à M. B. V (H. Yabasso, 26 Septembre 2022), c’est « une agriculture intégrée, avec des pratiques d’association de culture, l’intégration des arbres dans le champ, la restitution des résidus des récoltes aux animaux et l’utilisation des déjections des animaux dans le champ ». Fert (2015), dans la même logique que Fayama et Héma (2024) soulignait que la majeure partie des producteurs connaissent que l’agroécologie correspond à la gestion de la fertilité des sols et à la protection de l’environnement. Ils ont des connaissances diverses sur la pratique comme le note Gross, (2018). En effet, certaines pratiques agricoles notamment l’utilisation de compost, le zaï, les cordons pierreux, l’arboriculture étaient déjà adoptées par les paysans burkinabè. Toutes ces perceptions ne sont qu’une partie de ce qui est de l’agroécologie. Pour revenir à son importance, il ressort des entretiens que sa pratique est bénéfique pour ceux qui l’applique. 

En fait pour certains producteurs, l’agroécologie a permis d’accroitre leur rendement. C’est ce qu’on retient des propos de M R. H, (Yabasso, 27 Septembre 2022) « il y’a une très grande différence entre nos rendements avant et après l’adoption des pratiques agroécologique. Aujourd’hui nos récoltes sont meilleur grâce à l’agroécologie ». De plus, il y’a une prise de conscience des acteurs sur la nécessité de changer les techniques de production en allant vers des pratiques de production durable. De ce point de vue, M. E H, (Bodialedaga, Novembre 2022) explique que : « les méthodes de production d’avant ne nous permettent plus de faire une bonne récolte aujourd’hui donc nous sommes obligés de faire les pratiques agroécologiques dans notre champ ». 

Conclusion 

Les résultats issus de nos analyses montrent que les producteurs de la commune de Lèna sont dans une logique favorable d’adoption de nouvelles pratiques agroécologiques. En plus des connaissances endogènes utilisées dans la localité, les nouvelles pratiques sont perçues par les producteurs comme un avantage pour améliorer et renforcer les techniques existantes. Tout cela a été favorisé ou rendu possible grâce aux actions de renforcement de capacités de ces producteurs par le projet FAIR Sahel DeSira centré sur « l'intensification agroécologique pour la résilience des exploitations dans le Sahel » et qui a privilégié :

  • une approche participative pour développer des solutions répondant aux contraintes des producteurs ; 
  • une réflexion sur les leviers agroécologiques mobilisables au Sahel pour optimiser l’efficience et l’adaptation de la production agricole (gestion durable des sols, biodiversité végétale fonctionnelle, optimisation des interactions agriculture-élevage) ;
  • une intervention à plusieurs niveaux pour couvrir les problématiques liées à la transition agroécologie à l’échelle de la parcelle, des communautés et des territoires ;
  • un projet à l’interface de la recherche et du développement pour favoriser la conception et la diffusion de systèmes innovants.
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Tionyélé FAYAMA

Maitre de Recherche au Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique (CNRST) / Institut de l'Environnement et de Recherche Agricole (INERA), membre Labo « Genre et Développement » /UJKZ tionyele@yahoo.fr 

 

 

 

Références bibliographiques

BERELSON B., 1952. Content Analysis in Communication Research, The Free Press. p. 220;

CAMPENHOUDT LUC VAN, MARQUET JACQUES, ET QUIVY RAYMOND., 2017. Manuel de recherche en sciences sociales. 5ème édition. Dunod. P. 379.

FAYAMA et HEMA, 2024, Observer, décrire et interpréter les logiques des acteurs à l’adoption des pratiques agroécologiques dans la commune de Lena au Burkina Faso., Science et Technique, Lettres, Sciences humaines et sociales. Spécial hors-série n° 1.86-104P

FERT., 2015. Quel accompagnement des producteurs pour réussir la transition agro écologique ? De la pratique à une démarche. Fiche de capitalisation, Burkina Faso. 35 p ;

Gross B., 2018. Agroecologie du developpement maraicher au Burkina Faso : reorganisations spaciales, transformations socioeconomiques et enjeux de developpement. Thèse de doctorat, université Lausanne. 534 p .