Le Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) a tenu, le mardi 28 octobre 2025, une rencontre d’échanges au Centre national des arts, du spectacle et de l’audiovisuel (CENASA) avec les bénéficiaires, prestataires et chargés de suivi du Fonds de promotion culturelle (FPC). Objectif : renforcer la compréhension des obligations contractuelles, améliorer le suivi des projets et consolider la gouvernance de ce mécanisme crucial pour la création artistique nationale.
Le CENASA a retrouvé, ce mardi matin, une atmosphère d’écoute attentive et de dialogue professionnel. Dans la salle, artistes, producteurs, éditeurs, représentants d’associations culturelles et agents du BBDA se côtoyaient, unis par un même enjeu : la bonne exécution des projets financés par le Fonds de promotion culturelle. L’invitation portait la signature du directeur général du BBDA, Dr Hamed dit Patindeba Patric Léga, qui avait convié les acteurs à un moment de clarification, d’engagement et de redevabilité.
Dès les premiers mots de cette réunion, le ton était donné. Cette rencontre n’était pas une cérémonie protocolaire mais un atelier d’échanges. L’ambiance, empreinte de sérieux et de fraternité, traduisait la volonté commune de faire du Fonds de promotion culturelle un véritable levier de développement du secteur artistique burkinabè.
Un appel unique pour une meilleure exécution
Prenant la parole pour son mot de bienvenue, Dr Hamed dit Patindeba Patric Léga a salué la présence des bénéficiaires et des partenaires avant d’exposer les raisons de cette rencontre. Le BBDA, a-t-il souligné, a choisi en 2025 de procéder à un appel unique à projets, contrairement aux années précédentes où deux appels étaient lancés.

Ce changement vise à donner plus de temps aux artistes pour monter, exécuter et clôturer leurs projets dans de meilleures conditions. « Tous les contrats sont signés, les premiers décaissements effectués, les comités de suivi installés. Il ne reste qu’à travailler dans la rigueur et la sérénité », a-t-il indiqué.
Le Directeur général a insisté sur la nécessité d’une gestion saine des subventions et d’un suivi rigoureux des réalisations. Selon lui, les bilans des cinq derniers appels à projets ont révélé des insuffisances notables : projets inachevés, retards de rapports, mauvaise utilisation des fonds.
« Nous devons éviter ces écueils. Les résultats attendus de cette rencontre sont de renforcer la compréhension des obligations, d’améliorer la qualité du suivi et de réduire les taux d’échec », a-t-il déclaré.
Son mot, bref et concret, s’est conclu par la déclaration officielle d’ouverture de la rencontre.
Une gouvernance participative pour plus de transparence
La Secrétaire générale du BBDA, Mme Kaboré/Forgo Chantal a, quant à elle, détaillé le dispositif mis en place autour du Fonds. Elle a rappelé que le BBDA ne se limite pas à la gestion des droits d’auteur et voisins, mais qu’il est aussi un acteur de la promotion de la création artistique.

« Avec le Fonds de promotion culturelle, nous soutenons la création, la production et la diffusion d’œuvres dans toutes les disciplines : musique, littérature, arts plastiques, théâtre, danse, cinéma », a-t-elle expliqué.
Ce fonds, d’un montant global de 300 millions de francs CFA pour la session 2025, repose sur un principe simple, la transparence et la coresponsabilité. Le BBDA finance 85 % du coût des projets retenus, tandis que les bénéficiaires apportent 15 % de contribution personnelle.
Mais derrière ces chiffres, la Secrétaire générale du BBDA a tenu à souligner la logique de gouvernance participative adoptée par l’institution. Trois comités indépendants assurent la régulation du processus : un comité d’examen et de sélection des dossiers, un comité de validation des projets retenus et un comité de suivi des réalisations sur le terrain.
« Ce dispositif garantit la transparence et le professionnalisme que réclament nos membres. Il nous protège contre les dérives et renforce la crédibilité du BBDA », a-t-elle précisé.
Elle a également rappelé que les retards d’exécution des projets posaient de sérieux problèmes comptables et administratifs. D’où la décision, cette année, de concentrer les efforts sur un seul appel afin de maîtriser les délais et d’assurer une gestion financière rigoureuse.
Le FPC : fondements, financement et missions
La cheffe du service de promotion culturelle et des œuvres sociales, Mme Aminata Ouédraogo/Ba, a ensuite pris le relais pour présenter de manière détaillée le fonctionnement du Fonds de promotion culturelle.

Créé conformément aux dispositions de la loi n°048-2019/AN du 12 novembre 2019 sur la propriété littéraire et artistique et à la décision n°019/MCCAT/SG/BBDA du 1er juin 2023, le FPC est alimenté par deux principales sources : 35 % de la rémunération pour copie privée et 5 % des redevances traditionnelles collectées auprès des utilisateurs d’œuvres protégées.
Son rôle est double : soutenir financièrement les projets structurants et stimuler la vitalité du secteur culturel.
Les missions du fonds sont claires : Accompagner les créateurs membres du BBDA dans leurs initiatives de production et de diffusion ; renforcer la professionnalisation du secteur ; promouvoir le patrimoine artistique national et enrichir le répertoire du BBDA par la création d’œuvres nouvelles.
Pour l’année 2025, le tableau récapitulatif des financements fait état de 423 projets retenus sur 1 289 dossiers reçus, répartis comme suit :
294 projets musicaux, 33 littéraires, 32 en arts plastiques, 30 cinématographiques, 24 théâtraux et 10 de danse, pour un montant total de 282 715 000 F CFA, soit un taux global de réalisation de 92 %.
Ces chiffres, a rappelé Mme Ba, traduisent la vitalité et la diversité de la création burkinabè, mais aussi la sélectivité rigoureuse du dispositif.
Engagement, professionnalisme et redevabilité
L’un des points les plus attendus de la présentation concernait les termes contractuels.
Aminata Ouédraogo/Ba a rappelé que l’octroi de la subvention engage les deux parties, le BBDA et le bénéficiaire, dans un contrat clair et exigeant.

Le bénéficiaire s’engage à utiliser les fonds exclusivement pour la réalisation du projet, à respecter le calendrier de travail et à apposer la mention « avec l’appui du BBDA » sur ses supports de communication.
Le prestataire, de son côté, doit travailler avec professionnalisme et produire des œuvres de qualité, tout en facilitant le suivi par les agents mandatés.
Le BBDA, quant à lui, s’engage à verser 70 % de la subvention après signature du contrat et les 30 % restants après validation du projet par le chargé de suivi.
Mais l’institution se montre inflexible sur les dérives possibles. Ainsi, en cas de non-respect des clauses, l’artiste et le prestataire s’exposent à un remboursement intégral des sommes perçues et à une suspension du fonds pendant trois ans.

Une mesure dissuasive, mais nécessaire selon les responsables, pour préserver la crédibilité du dispositif et assurer sa pérennité.
Un dialogue ouvert et constructif
La phase des échanges, très animée, a permis aux participants d’exprimer leurs préoccupations.
Les questions ont porté sur la mobilité des artistes, la prise en charge des tournages, la gestion des partenariats entre artistes et prestataires, la répartition des droits d’auteur en littérature, et la nécessité d’un accompagnement technique renforcé.
Certains ont plaidé pour une révision à la hausse des montants alloués ou pour le versement intégral de la subvention dès le démarrage des projets, arguant des difficultés de trésorerie, ont rappelé les responsables du BBDA.
D’autres ont insisté sur la responsabilité partagée entre bénéficiaires et prestataires, rappelant que les conflits entre ces deux acteurs restent l’une des causes majeures des retards d’exécution.
Les représentants du BBDA ont répondu point par point, réaffirmant leur volonté de transparence et leur disponibilité à améliorer le dispositif. Ils ont toutefois rappelé que le succès du fonds repose d’abord sur la rigueur et la discipline des bénéficiaires.
« Le Fonds n’est pas une aide sociale, mais un mécanisme de financement structurant. Il doit être géré comme tel », a souligné Mme Kaboré/ Forgo Chantal.
Une institution en quête de résultats durables
En filigrane de cette rencontre, se lisait la volonté du BBDA de transformer le Fonds de promotion culturelle en outil durable de développement.
L’enjeu dépasse la simple distribution de subventions. Il s’agit d’asseoir une véritable culture de la reddition des comptes, du suivi-évaluation et de la qualité artistique.
Le BBDA entend, à travers ces échanges, instaurer une relation de confiance fondée sur la clarté, l’exemplarité et la responsabilité partagée entre l’administration et les créateurs.
Le message final, sobre mais ferme, résume l’esprit de la journée :
« Le Fonds de promotion culturelle est un mécanisme qui permet de booster la création artistique. Son utilisation à bon escient est indispensable pour en garantir la pérennité. »
Un fonds à préserver, un engagement à renouveler
Au sortir de cette rencontre, une conviction s’impose. Le Fonds de promotion culturelle n’est pas seulement un instrument de financement, mais un pacte de confiance entre le BBDA et les créateurs du Burkina Faso.
Sa survie dépend de la rigueur de ses bénéficiaires autant que de la transparence de ses gestionnaires.
Dans un contexte où la culture cherche à consolider sa place dans le développement national, ce fonds apparaît comme un souffle vital.
Encore faut-il que chacun, à son niveau, honore l’esprit du contrat : créer, rendre compte et bâtir durablement la crédibilité de l’art burkinabè.
Abrandi Arthur Liliou