Fadogia agrestis Schweinf. ex Hiern : Un arbrisseau ornemental et aphrodisiaque

ganaba

Introduction

Fadogia agrestis Schweinf. ex Hiern (ou Vangueria agrestis (Schweinf. ex Hiern) Lantz) est une plante médicinale traditionnelle africaine également utilisée comme complément alimentaire aux États-Unis (Raman et al, 2018). Lantz and Bremer (2005) ont transféré cette espèce dans le genre Vangueria sur la base de l’analyse phylogénétique.

Elle est appelée bit-koon-bré, bit-kôbre, rum-kim-guure en mooré, jouro saba, tolosaba en dioula, bonkourou, binŋkuru en gouin, baraboro en Lobiri,  konindié en bambana, demessê en bobo et Black aphrodisiac en anglais.

Fadogia agrestis est un arbuste indigène d'Afrique tropicale, appartenant à la famille des Rubiacées.

Propriétés de la plante

Des traces de métaux dont le fer, le manganèse et le nickel, détectés chez Fadogia agrestis, étaient inférieurs à la limite autorisée par l’organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour les plantes comestibles. Alors que d’autres métaux comme du plomb, du zinc du cadmium et du cuivre se sont avérés être dans la limite de sécurité. Le criblage phytochimique des extraits aqueux et méthanol a révélé la présence d’alcaloïdes, de flavonoïdes, de glycosides, de triterpènes et de tanins, de stéroïdes, de saponines, de phénols, d’anthraquinones et de glucides (Namadina et al, 2019).

L’extrait aqueux de la tige est constitué de saponines, d’alcaloïdes, d’anthraquinones et de flavonoïdes (Yakubu et coll., 2005). Les tiges des plantes sont largement utilisées en médecine folklorique comme aphrodisiaque (Irvine, 1961) et l’utilisation de cette plante comme revigorants sexuels vient d’être scientifiquement prouvée par Yakubu et coll. (2005). L'extrait aqueux de cette plante présentait des propriétés aphrodisiaques potentielles. Quatre glycosides triterpénoïdes de type ursane, deux glycosides de benzophénone et un glucoside iridoïde, dont trois nouveaux composés, ont été isolés et caractérisés à partir des racines séchées de la plante (Yakubu et al, 2005). 

Utilisations de la plante

Utilisations alimentaires

Les fruits sont de petites baies brunes comestibles au Ghana (Blench et Dendo, 2006). De nombreux compléments alimentaires portant l’étiquette F. agrestis comme ingrédient sont vendus sur le marché (Raman et al, 2018).

Les racines sont utilisées comme coupe-faim en consommation crue dans les soins de l’obésité au Burkina Faso selon Paré et al (2016).

Médecine traditionnelle

En médecine traditionnelle africaine, la plante est utilisée comme décoction pour le traitement de la fièvre, de la douleur et du paludisme (Avula et al, 2020). Elle est réputée pour son utilité contre la fièvre, le soulagement des douleurs rénales et son effet diurétique (Anéro et al, 2008). Elle est reconnue pour le traitement de la fièvre, des douleurs rénales, de la diarrhée, des maux d’estomac, de la blennorrhée et des maux de dents (Yakubu et al., 2005; Odugbemi, 2008). Elle est également utilisée comme diurétique et comme aphrodisiaque (Irvine, 1961 ; Avula et al, 2019,) comme analgésique et pour les activités anti-inflammatoires et aphrodisiaques (Avula et al, 2019). Plusieurs produits de diététique suppléments, contenant cette espèce en tant que principal ingrédient sont vendus sur le marché (Namadina et al, 2019).

Au Burkina Faso, Gardenia erubescens et Fadogia agrestis sont utilisés dans le traitement du paludisme au  Burkina Faso (Combasséré-Chérif et al, 2020). En région mossi du Burkina Faso, les rameaux feuillés de Fadogia agrestis en association avec les fruits de Gardenia ternifolia préparés en décoction prise en bain et en boisson est un fortifiant pour les convalescents (Bognounou et al, 1971).  La plante est également utilisée dans les soins des troubles de la vision chez les personnes adultes, l’hypermétropie et de la myopie : le macéré des racines et de graines d'arachide datant de 3 mois est utilisé pour se laver le visage, matin et soir chez l’ethnie goin dans la région de Niangoloko, au Sud-ouest du Burkina Faso, selon Ouôba et al (2005).

Une plante aphrodisiaque

Les différentes utilisations de Fadogia agrestis sont liées aux problèmes de performance sexuelle chez l’homme (dysfonction érectile, impuissance). En effet, un aphrodisiaque est un type d'aliment ou de boisson qui a pour effet d'exciter sexuellement ceux qui le mangent ou le boivent. Cette plante contient des substances qui augmentent la libido (c'est-à-dire l'excitation sexuelle). En effet, l'extrait aqueux de tige a augmenté les concentrations sanguines de testostérone et cela pourrait être le mécanisme responsable de ses effets aphrodisiaques et de divers comportements masculins. Il peut être utilisé pour modifier les fonctions sexuelles altérées chez les animaux, en particulier celles résultant de l'hypotestostéronémie (Yakubu et al, 2005).

Un aphrodisiaque est un agent (aliment ou médicament) qui suscite le désir sexuel. La chasse au supplément naturel à partir de plantes médicinales est intensifiée principalement en raison de ses effets secondaires moins nombreux (Kotta et al., 2013). La procréation demeure sous nos tropiques une question morale et religieuse importante et les aphrodisiaques sont recherchés pour assurer la puissance masculine et féminine.

Les utilisations de la plante sont également liées à l’amélioration de la performance athlétique et musculaire (photo 3).

Fadogia agrestis est une plante médicinale largement utilisée pour ses activités antibactériennes et aphrodisiaques.  L'analyse phytochimique quantitative a montré que les alcaloïdes (84,0 mg/g) étaient les composés phytochimiques les plus élevés détectés dans l'écorce de tige tandis que les plus faibles étaient les saponines (4,0 mg/g). La dose létale (DL 50) des deux extraits était supérieure à 5000 mg/kg et n'a pas causé de mortalité chez tous les rats testés. Les résultats de cette enquête peuvent être utiles pour déduire des doses sans danger pour la consommation humaine de racines la plante (Namadina et al, 2019).

Les racines de la plante peuvent être bouillies avec du thé Lipton et pris dans une petite tasse de thé la nuit. Elles peuvent également être mangées brut avec de la potasse rouge ou bouillie avec des épices et prises la nuit (Sabo et al, 2018).

Les altérations provoquées par l’extrait aqueux de tige à 100 mg/kg sont des indications d’effets indésirables sur la fonction testiculaire du rat mâle, ce qui peut nuire aux capacités fonctionnelles des testicules. La récupération effectuée à la dose de 18 mg/kg de poids corporel telle qu’utilisée en médecine traditionnelle suggère qu’il ne présente pas de toxicité permanente à cette dose (Yakubu et al ; 2008).

La racine bouillie avec du Lipton et prise en une petite tasse la nuit, est aphrodisiaque. Ou alors les racines peuvent être mâchées crues avec de la potasse rouge ou bouillies avec des épices et prises la nuit, selon Sabo et al (2017).

Une plante antidiabétique

L’extrait aqueux de Fadogia agrestis à des doses de 18, 36 et 72 mg / kg de poids corporel a été étudié pour l’activité antidiabétique chez les rats diabétiques induits par l’alloxane. Les résultats ont révélé que, toutes les doses de l’extrait ont significativement inversé les niveaux de ces biomolécules / paramètres biochimiques : taux de glucose sanguin et hépatique, d’urée sérique, de créatinine, d’albumine, de cholestérol total, de triacylglycérol, de cholestérol à lipoprotéines de basse densité). Toutefois, ces inversions ne se comparaient pas bien à leurs valeurs de contrôle respectives à la fin de la période d’exposition. Dans l’ensemble, l’extrait aqueux de tige de F. agrestis s’est révélé prometteur en tant qu’agent antidiabétique (Yakukbu et Ogunro, 2014).

L’extrait aqueux de tige a augmenté les concentrations sanguines de testostérone et cela peut être le mécanisme responsable de ses effets aphrodisiaques et de divers comportements masculins. Il peut être utilisé pour modifier les fonctions sexuelles altérées chez les animaux, en particulier celles résultant d’un taux de testostérone faible (hypotestostéronemie ;Yakubu et al, 2005).

Description de la plante

Fadogia agrestis est une plante vivace par sa souche, mais à tiges caduques, distribuée de l’Ouest de l’Afrique tropicale au Soudan du Sud. C’est un arbuste nain pouvant atteindre 50 cm de haut avec des tiges ligneuses et des porte-greffes. C’est une petite plante à feuilles verticillées, très tomenteuses dessous est très commune dans toutes les formations de savanes depuis la zone préforestière jusqu'aux confins de la zone soudanienne (Kerharo et Bouquet, 1950). Les feuilles sont tomenteuses dessous comme la tige ; ils sont jaunâtres (photo 1).

La floraison intervient en début de saison des pluies. Les fleurs sont groupées, jaune verdâtre à longues pétales. La pollinisation est réalisée par les chauves-souris et les abeilles.  Les fruits sont des drupes sphériques avec les vestiges des sépales (photo 2).

Cette plante est devenue rare et retranchée dans les formations sud soudaniennes comme dans la Sissili (Ganaba et al, 2020), la forêt classée de Péni dans les Hauts Bassins (Tiendrébéogo, 2023), dans la forêt classée de  Niangoloko dans le Sud-Ouest (Ouoba et al, 2005) avec des pieds reliques rencontrés dans le Ganzourgou, dans le Plateau central.

La reproduction se fait par germination des graines mais également par bouture et greffage (Busson, 1965).

Culture

La floraison de Fadogia agrestis se déroule entre mai et août et la fructification intervient dans le mois d’août-septembre dans la région dans la zone de Bondoukouy, au Burkina Faso  (Fournier, 1999). Très peu de travaux ont été réalisés sur le potentiel de reproduction de la plante dont les ressources sont menacées. Des essais de culture en semis de graines et/ou par bouturage doivent conduits pour maitriser la sylviculture de la plante. Des actions de culture in vitro sont urgentes dans des zones protégées comme dans les cours d’habitation pour disposer de la plante.

Conclusion

C’est une plante commune des savanes mais en forte régression qui était utilisée dans la médecine traditionnelle d’Afrique comme diurétique et aphrodisiaque ainsi que pour le traitement de la fièvre, des douleurs rénales, de la diarrhée, des maux d’estomac, de la blennorrhée et des maux de dents. Au regard de l’importance des services rendus par cette plante, elle mérite d’être cultivée et promue pour la sauvegarde et la valorisation de la diversité biologique et des ressources phytogénétiques.

Par Ganaba Souleymane, CNRST/INERA, Département Environnement et Forêts, BP 7047 Ouagadougou 03, Burkina Faso, email : ganabasouley@gmail.com

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