Pour sa 18ᵉ édition, qui coïncide avec le 25ᵉ anniversaire de la biennale, la Foire internationale du livre de Ouagadougou (FILO) a ouvert ses portes le mardi 25 novembre 2025, à la Bibliothèque nationale du Burkina, à Ouagadougou. La cérémonie officielle d’ouverture, riche en symboles et en discours forts, a mis en avant la souveraineté intellectuelle, rendu hommage aux bâtisseurs du livre burkinabè, lancé un appel vibrant à la jeunesse et défendu la culture comme rempart contre l’obscurantisme, faisant de cet évènement un véritable carrefour de mémoire, de résistance et de vision.
Ouagadougou vibrera, du 25 au 30 novembre 2025, au rythme de la pensée libre et du savoir en accueillant la 18e édition de la Foire Internationale du Livre de Ouagadougou (FILO). Coïncidant avec le 25e anniversaire de cette biennale culturelle, l'évènement s'affirme non seulement comme un phare de la littérature africaine, mais surtout comme un acte de résistance culturelle face aux défis de l'heure. Sous le thème poignant « Livre, identités culturelles et souveraineté nationale », la FILO 2025 réunit acteurs du livre, autorités et un public engagé, tous unis par la conviction que la bataille pour la survie de la nation se gagne aussi par la connaissance et la fierté de l'héritage.
Le livre comme arme pacifique contre l'obscurantisme
La cérémonie d’ouverture de la 18e édition de la FILO, qui s'est tenue sur le site hautement symbolique de la Bibliothèque nationale du Burkina, n'était pas un simple rassemblement littéraire ; c'était un serment d'espérance.
L'évènement a débuté par le mot de bienvenue chaleureux de Sidonie Ouédraogo, quatrième vice-présidente de la commune de Ouagadougou, représentant le président de la délégation spéciale, Maurice Konaté. Prenant la parole, elle a exprimé « un honneur et une joie immense » de souhaiter la bienvenue aux participants à « Ouagadougou, cité emblématique de la culture, de la création et du savoir, à l'occasion de la 18e édition de la Foire internationale du livre ».

Sidonie Ouédraogo a insisté sur l'identité de la capitale, fière et honorée d’accueillir « les auteurs, éditeurs, libraires, lecteurs et amoureux du livre venus du Burkina Faso, d'Afrique et d'autres horizons. » Adressant un salut fraternel et reconnaissant aux délégations étrangères, elle a rappelé que leur présence est un « acte de solidarité culturelle, un témoignage de fraternité intellectuelle et la preuve que, par-delà les frontières, le livre demeure un pont » et un « ferment d'universalité ». Elle a également affirmé l'engagement de la Délégation spéciale à soutenir toutes les initiatives qui favorisent la lecture publique et l’épanouissement intellectuel de la jeunesse, avant de conclure par ses vœux pour que cette édition soit un « temps de rencontre, de partage et d'inspiration ».
Le thème, « Livre, identités culturelles et souveraineté nationale », a ensuite résonné comme un impératif national. C’est le Premier ministre, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo qui a transmis le message du Capitaine Ibrahim Traoré, Président du Faso, Chef de l'État. Ce discours a mis en lumière une vérité essentielle : « Il n’est pas de souveraineté véritable sans souveraineté intellectuelle et culturelle. »

Le livre est ici conceptualisé comme bien plus qu'un simple objet de lecture. Il est la « mémoire vivante de la Nation », le gardien silencieux de son histoire et le « messager de nos espérances ». Face aux défis sécuritaires, à l’obscurantisme et à la « guerre que l’on mène à notre culture », la réponse du gouvernement est claire : « Nous devons donc livrer, avec la même détermination, la bataille du savoir, de la connaissance et de la pensée libre ». Le livre devient ainsi une arme à la fois pacifique et puissante, capable de « désarmer la peur par la compréhension » et de « détruire l’ignorance par la lumière du savoir ».

Cet appel à la mobilisation intellectuelle a été fortement appuyé par le Ministre de la Refondation, de la Culture et de la Promotion des Valeurs sociales du Niger, Ben Salah Hamouda, qui a souligné que les chaînes les plus difficiles à porter sont celles de l'ignorance, exhortant les participants à revenir à la lecture et à l'écrit.
Le Secteur privé, partenaire de l'émancipation
L'engagement du secteur privé a marqué cette édition grâce à la présence d'Idrissa Nassa, Président du Conseil d'Administration de Coris Holding, en tant que Parrain de la 18e édition. Pour lui, soutenir le livre est une « mission et un engagement » qui va bien au-delà du mécénat. En sa qualité de président du patronat burkinabè, Idrissa Nassa a insisté sur le lien intrinsèque entre développement économique et savoir. « Aucune économie ne peut s’ériger sans une culture assumée, sans une dynamique de transmission du savoir », a-t-il affirmé. Pour le groupe Coris, le livre est un « capital inestimable, un levier de transformation silencieux, mais déterminant. »

« En parrainant la FILO, Coris Holding ancre l'idée que le livre est un investissement dans l'avenir, semant les graines d'un peuple libre, responsable et souverain », a-t-il ajouté.
Les chiffres clés d'une édition anniversaire en croissance
La 18e édition de la FILO, marquant un quart de siècle d’existence, a témoigné d’un dynamisme et d’une croissance remarquables, preuve de la résilience du secteur malgré les contraintes. Le Ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme, Pingdwendé Gilbert Ouédraogo, a livré les chiffres clés qui illustrent cette effervescence.

Cette édition a enregistré 122 acteurs en compétition pour le Grand Prix de la FILO, un bond significatif par rapport aux 73 participants de l’édition précédente. De même, les Olympiades littéraires ont attiré 785 participants, dépassant les 685 de l'année précédente, confirmant un engagement accru de la jeunesse pour le savoir. Au total, la FILO 2025 attend environ 8 000 festivaliers, témoignant de l'importance que cet évènement a su conserver dans le cœur des Burkinabè.
Innovations et Intégration Régionale
La FILO 2025 a également été une édition de rupture et d’innovation, notamment avec :
Le renforcement et la diversification des Grands Prix de la FILO ; la pleine intégration des langues nationales dans les ateliers et activités, signe d'une volonté d'ancrage identitaire ; la création du Grand Prix FILO de l’Intégration de la Confédération des États du Sahel (AES), un symbole fort de fraternité et d'union avec le Mali et le Niger.
Ces initiatives confirment le rôle de la FILO comme un véritable laboratoire d’idées sur l’avenir du livre africain, allant au-delà de la simple foire commerciale pour devenir un forum intellectuel régional.
Le Symbole Fort de la Bibliothèque Nationale
Le choix du site de la Bibliothèque nationale du Burkina pour l'ouverture revêt une « portée symbolique de haute dimension ». Ce lieu n'est pas seulement un espace physique, il incarne l'ambition du gouvernement de doter le pays d'une infrastructure moderne dédiée à la mémoire et au savoir burkinabè.
Le Ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme a souligné un moment clé de la cérémonie : l’inauguration d'une nouvelle infrastructure au sein de la Bibliothèque, rendue possible grâce à la générosité de l'Ambassade du Japon et de l’Association Littérature Sans Frontière. L’infrastructure a coûté plus de 91 millions de francs CFA et est bâtie sur une superficie de 246 m².
Elle est constituée d'une salle de lecture, d'une salle de stockage de livres, d'un bureau, de salles d’eau et d'un pavillon externe, le tout entièrement équipé de mobiliers de bureau et de matériels informatiques.

Cette inauguration est la preuve tangible que l'engagement pour le livre et le savoir se traduit par des actes concrets et des investissements structurants, essentiels pour l’épanouissement intellectuel de la jeunesse, comme l'a rappelé la quatrième vice-présidente de la commune de Ouagadougou.
L'Appel aux Jeunes : Lire, Écrire, Bâtir
Le message commun qui a traversé tous les discours s'adressait avec insistance à la jeunesse burkinabè et africaine. Le Président du Faso a clairement désigné cette génération comme « celle qui doit transformer notre résistance en victoire durable » et leur a rappelé : « Ne laissez personne penser à votre place. Lisez, explorez, questionnez, créez. »
Cette interpellation est un écho direct aux paroles de l'illustre Amadou Hampâté Bâ, rappelant que l'avenir de l'Afrique dépend de sa jeunesse. Parrainer la FILO, c'est accepter d'être un « passeur de flammes », cette flamme de la connaissance, de la curiosité et de l'élévation de l'esprit.

Le Ministre nigérien a rappelé, avec émotion, la nécessité de rester éveillé intellectuellement en hommage aux forces de défense et de sécurité qui « restent éveillés pour que par la grâce d’Allah, notre sommeil soit paisible ». La lecture et l'écrit sont le pendant civil et intellectuel de cette veille militaire.
Le message est clair : « Un peuple qui lit est un peuple qui sait se réinventer, un peuple qui écrit est un peuple qui bâtit, un peuple qui publie est un peuple qui rayonne. »
La 18e Foire Internationale du Livre de Ouagadougou restera gravée comme l'édition de la maturité et de l'affirmation. En célébrant ses 25 ans, la FILO ne s’est pas contentée d'exposer des livres ; elle a élevé le savoir au rang de principe de souveraineté et d'outil de victoire. Face aux turbulences, la culture s'est dressée comme un rempart inébranlable, prouvant que la plus grande des aliénations est l’ignorance. Les 8 000 festivaliers attendus, les 122 auteurs en compétition et la création d'un prix de l'intégration pour l'AES sont les témoins chiffrés d'une conviction profonde : la Patrie des Hommes Intègres écrira son avenir avec la force de sa plume, la richesse de ses identités et la lumière de sa connaissance. Comme l'a martelé le Ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme : « En célébrant la FILO, nous célébrons le pouvoir des mots, la liberté de penser et l'espoir d'un Burkina Faso souverain, debout et confiant en son avenir. »
Abrandi Arthur Liliou